17 juin 2022
Nous avons le plaisir d’annoncer que M. Sari Madi, candidat au doctorat à l’École des relations industrielles de l’Université de Montréal et étudiant membre du CRIMT, a défendu aujourd’hui avec succès sa thèse de doctorat intitulée : Essai d’analyse institutionnelle des pactes sociaux et des normes du travail sur deux pays en développement : au Liban et en Tunisie.
Toutes nos félicitations, au nom des cochercheur.euse.s et des étudiant.e.s membres du CRIMT.
Résumé de thèse
Cette thèse se penche sur la transformation de deux institutions du marché du travail, les normes du travail (1990 – 2010) et les pactes sociaux (2010 – 2017), dans deux pays en développement, soit le Liban et la Tunisie. Elle avance trois contributions principales à la littérature en relations industrielles. Premièrement, nous analysons le contenu des transformations de deux institutions dans deux pays non couverts par la littérature. La signification des réformes des normes du travail est qualifiée du point de vue du lien entre flexibilité et sécurité de l’emploi. Le contenu des pactes sociaux est distingué selon les dimensions évoquées dans la littérature, notamment l’impact du pacte sur l’institutionnalisation du dialogue social au niveau national. Deuxièmement, nous accordons une attention particulière au processus du changement institutionnel. Il s’agit de caractériser les modes de changement graduel de deux institutions (Streeck et Thelen, 2005). Troisièmement, nous analysons les facteurs clés et la dynamique des relations du travail derrière ces transformations. Par exemple, nous mobilisons la notion de l’héritage institutionnel pour examiner les ressources de pouvoir syndical. Ainsi, nous distinguons la légitimité morale-structurelle (Suchman, 1995) du mouvement syndical tunisien de celle du mouvement syndical libanais à la suite de l’analyse d’un historique d’événements.
Nous avons opté pour une approche qualitative basée sur une étude de cas multiple et de type encastré. Nous avons effectué deux études sur le terrain, une au Liban et l’autre en Tunisie afin de construire une base de données de 50 entrevues semi-dirigées et de consulter les archives.
Trois facteurs expliquent les résultats des transformations de l’institution du dialogue social et des normes du travail : le type de canal d’influence, la nature de la coalition politique (et le rôle du syndicat au sein de cette coalition), et le rôle des Organisations Internationales (OI). Le canal d’influence est de type formel en Tunisie et est établi depuis les années 1970. Ce canal tripartite a assuré l’implication du syndicat dans la réforme de deux institutions. L’inexistence d’un canal d’influence formel au Liban a ouvert la voie à l’adoption des formules divergentes. La coalition politique tunisienne tire ses origines de la libération du pays du colonialisme français. Le syndicat s’est réservé une place au sein de la coalition en mobilisant ses ressources de pouvoir, en particulier sa « légitimité structurelle » et sa présence dans le secteur public. La transition démocratique renforce davantage le pouvoir syndical et lui accorde un rôle de premier plan. La coalition politique libanaise est formée par les élites économiques et politiques. Elle a réussi à exclure le mouvement syndical de ses rangs parce que celui-ci ne possède pas les ressources de pouvoir adéquates. La coalition politique contrôle le marché du travail libanais par un réseau de privilèges, formant ainsi un canal d’influence informel du patronat sur le déroulement des réformes. Les OI jouent un rôle déclencheur des réformes sans pour autant déterminer les résultats.